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Techniques d’entrevue et d’interrogatoire

  • Photo du rédacteur: Luc Marcil
    Luc Marcil
  • 16 sept. 2024
  • 16 min de lecture

Dernière mise à jour : 10 avr.


Techniques d’Entrevue et d’Interrogatoire

Par : André Lepage, FCPA, CPA●EJC, CFF, CFE

Associé principal

Lepage Marcil David Juricomptables inc.


Lors de la réalisation d’une enquête sur des soupçons et allégations de fraude ou autres irrégularités financières, deux types de preuves sont réunis: la preuve documentaire et la preuve orale. Les preuves documentaires sont des preuves recueillies à partir de documents papier, de dossiers ou données informatiques et d'autres sources écrites, imprimées ou électroniques.


Les preuves orales sont rassemblées au moyen d’interviews et d’interrogatoires. Interviewer est un art. Contrairement à la preuve documentaire, qui dit ce qu'elle dit et ne change pas avec le temps, la preuve orale dépend de l'efficacité de l'intervieweur, son expérience, ses compétences et son intuition.


Les paragraphes suivants vont essayer de répondre aux questions suivantes :


  • Qu'est-ce qu'une interview, qu’est-ce qu’un interrogatoire, et quels sont leurs buts?


  • Quelles sont les compétences requises d'un juricomptable-enquêteur lors de ses entretiens pour recueillir des informations ou des preuves orales?


  • Comment poser des questions efficacement pour obtenir les meilleurs résultats.


  • Comment interpréter les réponses reçues.


Qu’est-ce qu’une entrevue, qu’est-ce qu’un interrogatoire?


Une entrevue ou interview au niveau le plus élémentaire peut être simplement une conversation entre deux personnes ou plus (l'intervieweur et la personne interrogée), l'intervieweur posant des questions pour obtenir des informations de la personne interrogée. Nous le faisons tout le temps dans notre vie quotidienne. Mais dans une enquête, l'interview prend un ton différent. Cela devient une conversation avec un but. Le but ultime d’une interview est de déterminer la vérité en rassemblant tous les faits en cause.


On tient une interview avec un témoin, avec une victime, personnes habituellement disposées à fournir de l’information. Mais on soumet à un interrogatoire, un suspect, une personne habituellement non désireuse de coopérer avec les autorités, que ce soit des représentants officiels d’une entreprise d’un employeur ou bien les autorités policières ou toutes autres autorités chargées de faire appliquer une loi. Nous disons habituellement, car de même qu’il arrive qu’un témoin, qu’une victime soient réticents, surtout par crainte, de même il arrive qu’une personne soupçonnée d’un crime qu’elle n’a pas commis, soit très coopérative, voulant se sortir d’une mauvaise situation.


Types d’entrevue et d’interrogatoire


Les séries télévisées sont pleines de dramatiques policières où, après une entrevue ou un interrogatoire, le suspect fournit des aveux à la fin de l'émission. Ces émissions font qu'il semble facile de mener un interrogatoire avec un suspect et d'obtenir des aveux. La vraie vie est toute autre. Ce n'est pas facile. Tout d'abord, les enquêteurs policiers ont reçu une formation approfondie en matière d'interrogatoire, ce qui n'est pas le cas des comptables professionnels agréés, et même de plusieurs juricomptables (« les comptables»). Même s'il est possible d'obtenir une formation sur la conduite d'interviews et d’interrogatoires efficaces, les comptables n'ont pas l'occasion de participer ou de pratiquer aussi souvent que leurs homologues du service de police. Deuxièmement, les agents de police ont un niveau d'autorité qui découle de leur position dans la société que les comptables n'ont pas. Ce sont des agents de la paix.


Il est bon de préciser que le policier qui enquête une fraude fait une enquête criminelle et non civile. Il veut résoudre un crime et avoir suffisamment de preuves pour permettre de faire condamner un fraudeur. À ce titre, il doit accumuler une preuve hors de tout doute raisonnable. L’interrogatoire d’un suspect doit survenir une fois que le policier aura accumulé le plus de preuves et d’éléments probants quant aux faits et circonstances entourant la fraude ou le crime. Procéder trop rapidement à l’interrogatoire d’un suspect lorsqu’il s’agit d’une fraude, est une erreur qui peut mettre en péril l’enquête et résulter en la disparition ou la modification intentionnelle d’éléments de preuve importants. Des complices pourraient également ajuster leurs versions des faits dans le but de se protéger.


Déclaration ou confession admissible devant un tribunal de juridiction criminelle


Avant de procéder à l’interrogatoire d’un suspect et de s’assurer que toute déclaration ou confession soit admissible devant un tribunal de juridiction criminelle, le policier lui lira ses droits. Il lui expliquera qu’il a le droit au silence, qu’il peut avoir recours immédiatement à l’assistance d’un avocat et même que s’il répond à certains critères financiers, il peut avoir droit à l’assistance d’un avocat d’office du service de l’aide juridique. On l’informera qu’il n’a rien à espérer de promesses, ni rien à craindre de menaces mais que tout ce qu’il dira pourra servir de preuve devant un tribunal. Cette confession doit être obtenue de façon libre et volontaire et conformément à la Loi de la preuve du Canada.


Il est bon à souligner qu’au sens du Code criminel canadien, les représentants d’une entreprise qui font enquête sur un employé, que ce soit, à titre d’exemple, le Vérificateur interne ou un consultant externe juricomptable, sont considérés comme des personnes en autorité lorsqu’ils obtiennent une déclaration extrajudiciaire ou une confession et qu’ils veulent que cette dernière soit déposée devant un tribunal de juridiction criminelle. Ils devront donc faire exactement comme les policiers, soit de donner au suspect le droit au silence, le droit à l’avocat, ainsi que de donner une mise en garde à l’effet qu’il n’a rien à espérer de promesses, ni rien à craindre de menaces mais que tout ce qu’il dira pourra servir de preuve devant un tribunal.


Lors d’un procès et afin qu’elle soit acceptable et déposer à titre de preuve, toute confession, que ce soit verbale ou par écrit, devra faire l’objet d’une procédure de « voir-dire ». Qu’est-ce qu’un Voir-Dire? À ne pas confondre avec du « Oui-Dire ». C’est une étape de la procédure judiciaire qui permet au juge de déterminer une question en interrogeant le témoin d’un événement. C’est un interrogatoire préliminaire ou, comme l’usage le dit, « un procès dans le procès » ("a trial within a trial") au cours duquel un témoin est interrogé, avant de continuer à rendre témoignage, au sujet notamment de sa capacité à témoigner et de son intérêt dans l’affaire. Un tel interrogatoire peut aussi viser à établir le caractère volontaire d’un aveu fait par un accusé à un agent de police ou à une personne en autorité selon le Code Criminel canadien. En ce cas, le voir-dire a pour objet de faire apprécier le caractère volontaire des déclarations extrajudiciaires de l’accusé faites à une personne placée en situation d’autorité.


Donc il est de mise, pour les enquêteurs et interviewers, de maintenir un procès-verbal tout au long du déroulement de la rencontre avec le suspect. On prendra note entres autres :

  • De l’endroit où a lieu l’interrogatoire


  • Les noms des personnes présentes et le rôle de chacun


  • L’heure exacte du début et de la fin de l’interrogatoire


  • L’heure exacte où le droit au silence, le droit à l’avocat et les mises en garde d’usage ont été lus au suspect


  • L’heure exacte des pauses santé, du lunch, et la reprise de l’interrogatoire


  • L’heure exacte où on a servi des breuvages et nourriture au suspect, et la nature de ces breuvages et nourriture, etc.


Lors d’un interrogatoire, il est souhaitable que l’interviewer soit accompagné d’un témoin. Ce dernier prendra des notes. Néanmoins, il est préférable que l’interrogatoire ne soit mené, et que les questions ne soient posées, que par une seule et même personne.


Si l’interrogatoire est mis sur vidéo, une seule personne pour interroger le suspect peut être adéquat et suffisant. Néanmoins, il est préférable de ne pas être plus que deux personnes. Plus de deux personnes pourraient être perçu comme intimidant de la part du suspect.


Déclaration ou confession obtenue dans le cadre d’une enquête interne et devant servir

dans une procédure civile, administrative ou de droit du travail


Si la déclaration ou la confession ne doit servir que dans le cadre d’une enquête interne, d’une procédure civile, administrative ou de droit du travail, il n’est pas nécessaire de donner au suspect le droit au silence, le droit à l’avocat, ainsi que de donner une mise en garde à l’effet qu’il n’a rien à espérer de promesses, ni rien à craindre de menaces mais que tout ce qu’il dira pourra servir de preuve devant un tribunal. Il est même souhaitable de ne pas le faire, car cela pourrait créer une réticence de la part du suspect à donner une confession.


Comment prendre la confession ou une déclaration extrajudiciaire d’un suspect

Confession ou déclaration extrajudiciaire obtenue sur vidéo


Une confession ou déclaration extrajudiciaire peut-être obtenues et enregistrées de façon numérique sur vidéo. À cet effet, l’interviewer prendra note dans son procès-verbal devant servir à la procédure de Voir-dire, des informations techniques des appareils ou équipements utilisés.


Déclaration extrajudiciaire écrite – sous forme narrative


Une autre forme de déclaration extrajudiciaire consiste à laisser le suspect écrire dans ses mots, un texte, où il raconte sa version des faits.


Que ce soit un témoin ou une victime qui donne une déclaration extrajudiciaire, si l’enquêteur ou interviewer a des motifs de croire que le témoin ou la victime, par intérêt ou par crainte, modifiera peut-être sa version lorsqu’appelé devant le tribunal, la déclaration devrait être assermentée ou sous forme de déclaration solennelle. Une telle déclaration sert à contrôler le témoignage rendu devant le tribunal.


Lors d’une entrevue ou d’un interrogatoire, il est permis au Canada de faire un enregistrement numérique de l’entrevue ou de l’interrogatoire sans que le témoin ou le suspect en soit avisé. Cette pratique est interdite dans plusieurs États aux É-U.


Moment et lieu d’une entrevue et d’un interrogatoire


Une entrevue d’un témoin doit être organisée le plus rapidement possible après les événements faisant l'objet de l’enquête, car la mémoire des détails spécifiques qui peuvent être cruciaux pour l'enquête diminue avec le temps. L’enquêteur doit néanmoins s’assurer que la preuve documentaire ou électronique soit gardée en lieu sûr et protégée avant de communiquer avec des témoins. Il doit s’assurer, autant soit peu, que les témoins ne communiqueront pas entre eux, afin que les uns n’influencent pas les autres. Quant à l’interrogatoire d’un suspect, c’est la dernière étape de l’enquête. L’enquêteur doit avoir la meilleure connaissance possible des faits et circonstances entourant ces irrégularités, du stratagème utilisé, des dires de témoins préalablement recueillis, avant de procéder à l’interrogatoire.


Si l’enquêteur est un policier, il utilisera les salles d’interrogatoires de son corps de police. Si l’enquêteur est un consultant externe juricomptable, possédant l’expérience et les connaissances pour effectuer un interrogatoire, il choisira un lieu neutre, par exemple une salle de conférence. Les avantages d'un tel emplacement sont qu'il permet à l'intervieweur de prendre le contrôle de la situation et minimise les risques d'interruptions. Étant donné que l'intervieweur veut toujours contrôler l'interview ou l'interrogatoire, le lieu est important. Si l'interview ou l'interrogatoire a lieu dans le bureau de l'enquêté, il / elle est en position de pouvoir. Par exemple, l'interviewé peut mettre fin à l'entretien avant que l'intervieweur ne soit prêt si l’entrevue ou l'interrogatoire devient inconfortable pour l'interviewé. Il ne devrait y avoir aucune interruption ou distraction pendant une entrevue ou un interrogatoire, car celles-ci ont tendance à affecter négativement le déroulement des questions. Un appel téléphonique ou un coup à la porte à un moment critique de l'interview pourrait avoir pour conséquence que celle-ci se dérobe et ne revienne jamais.


Il est préférable d’utiliser une salle d’environ 3,5m X 3,5m, suffisamment éclairée, sans téléphone ou que le téléphone soit débranché. L’ameublement doit être réduit au minimum, une table et trois chaises. Il est préférable de placer le suspect dans une position d’infériorité. L’enquêteur en charge et son collègue devraient toujours choisir des positions avantageuses par rapport au sujet qu’ils vont interroger. Il est bon que ce dernier puisse être observé à la fois de face et de profil.


Préparation à un interrogatoire


Comme pour tous les aspects d’une enquête, la préparation est essentielle au succès. Il n’y a généralement qu’une possibilité d’interroger une personne, il est donc important que le résultat requis soit atteint et que le temps soit utilisé efficacement.


La préparation comprend trois parties: préparer un plan des sujets à traiter, organiser les documents à discuter et rassembler les connaissances de base de la personne interrogée.


a) Préparer un plan


Un interrogatoire peut être utilisé pour corroborer les preuves déjà rassemblées ou pour rassembler plus de preuves (recherche de faits). Quel que soit le type d’interrogatoire, il est nécessaire d’avoir un plan ou un script assez détaillé des domaines à couvrir et des questions à poser; le degré de détail dépendra de l'expérience de l'intervieweur. Il n’est pas nécessaire de s’en tenir au plan, puisqu’un interrogatoire est un processus dynamique dans lequel on peut laisser les choses se faire de manière tangible en fonction de la situation. Si vous vous en tenez trop à un script, le déroulement de la discussion sera ralenti. Le plan est important pour garantir que tous les domaines sur lesquels l'enquêteur a voulu poser des questions soient couverts avant la fin de l’interrogatoire.


b) Organiser les documents


Les enquêtes juricomptables ou de crimes économiques ont tendance à avoir un volume important de documents à examiner. L’un des objectifs d’un interrogatoire est souvent d’obtenir des commentaires ou des explications sur des documents tels que des factures, des contrats, des chèques encaissés, etc. La préparation à l'entretien implique que tous les documents pertinents soient bien organisés et facilement accessibles. Le fait de disposer des documents permettra d’intensifier la discussion ou de régler les divergences et éventuellement de les résoudre immédiatement. Des documents bien organisés permettent de maintenir le déroulement de l'interrogatoire.


c) Rassembler les connaissances de bases de la personne interrogée


La préparation implique également d’en savoir autant que possible sur la personne à interroger. Les informations de base peuvent être rassemblées en parlant à des collègues, en examinant les dossiers du personnel et même en effectuant une vérification complète des dossiers publics. Les informations générales comprennent les antécédents professionnels, la situation financière et la vie personnelle, telles que l’état matrimonial et le nombre de personnes à charge. L'étendue des informations de base à recueillir dépend de la raison pour laquelle la personne est interrogée. Si la personne est un suspect impliqué dans des activités inappropriées, la connaissance des pressions qu’elle subit peut contribuer au niveau de coopération et à l’établissement de bonnes relations ou rapport avec l’enquêteur ou interviewer.


Établir une relation


Il est essentiel de mettre la personne interrogée à l'aise, car davantage d'informations seront collectées si elle est à l'aise et plus disposée à coopérer. Les personnes interrogées sont naturellement angoissées et stressées, même si elles ne semblent pas en avoir l'apparence extérieure. Ne présumez pas qu'une personne très stressée est coupable de quelque chose. Il peut ne s'agir que de la peur de l'autorité ou de l'impossibilité de répondre aux questions et de paraître ainsi inconscient. Tout ce que l’interviewer peut faire pour mettre la personne interrogée à l'aise sera utile, car cela facilitera le flux de communication et permettra d’obtenir des informations plus utiles.


Il faut commencer l’entretien en construisant une relation. Il faut briser la glace en trouvant un terrain d’entente, en discutant brièvement sur des sujets neutres, tels que la météo, les événements sportifs récents, etc. L’interviewer sera présenté comme une personne amicale et engageante.


Lorsqu'il est temps de commencer la partie formelle de l'interrogatoire, il faut fournir à la personne interrogée des informations générales pour la rassurer. Ces informations comprendraient: le but de l'entretien; sous l'autorité de laquelle l'entretien est mené; pourquoi cette personne a été sélectionnée pour un entretien.


L’interrogatoire devra débuter par des questions simples, basées sur des faits, telles que: combien de temps la personne a-t-elle passé dans l'entreprise, où était-elle avant son emploi actuel, la description de travail actuel et les responsabilités. Bien que l'intervieweur ait pu rassembler ces faits auprès d'autres personnes, cela est utile pour nouer une relation avec l'interviewé et faciliter la conversation.


Observer l’interviewé


Un interrogatoire, tout comme une entrevue, est mené non seulement avec les oreilles mais aussi avec les yeux. Au cours de la phase d'établissement de la relation, l'intervieweur n'écoute pas simplement ce qui est dit, il observe l'interviewé alors qu'il / elle est relativement à l'aise. Les observations comprennent la posture, les expressions faciales, les gestes de la main, le ton, le niveau d'animation, etc. Au fur et à mesure que l'entretien se poursuit, la personne interrogée peut parfois devenir inconfortable en raison du type de questions et du sujet traité. En observant des changements dans le comportement de l'interviewé, l'intervieweur peut évaluer l'honnêteté des réponses données.


Conclure un interrogatoire ou une entrevue


Une entrevue doit toujours se terminer sur une note positive. Il faut terminer en donnant à l’interviewé l’occasion de dire tout ce qu’il n’aurait peut-être pas dit auparavant. Une bonne question finale qui pourrait susciter une réponse intéressante est: "Parfois, les gens s'attendent à ce qu'on leur demande de répondre à certaines questions. Quelles questions vous attendiez-vous de moi, mais que je n’aurais pas posée?" De plus, l'interviewé doit être invité à contacter l'intervieweur si des informations supplémentaires lui reviennent à l’esprit.


Il est important de laisser une ouverture pour les questions supplémentaires qui pourraient survenir. Des informations peuvent apparaître à mesure que l'enquête se poursuit, ce qui nécessitera des questions supplémentaires, voire une nouvelle interview. La personne interrogée doit être informée de cette possibilité.


Il faut toujours remercier l'interviewé pour son temps et sa coopération. Il ne faut pas oublier que même si nous obtenons la collaboration de la personne interrogée, une personne peut refuser d'être interrogée par un comptable dans le cadre d'une enquête.


Prendre des notes


Il est important de prendre des notes approfondies lors d’un interrogatoire ou d'une entrevue car la mémoire diminue progressivement et il ne sera pas possible de se souvenir des réponses exactes données à des questions spécifiques. Les résultats d'une entrevue sont les notes prises par l'intervieweur et lui appartiennent. L'interviewé peut demander une copie des notes de l'intervieweur. C'est à l'intervieweur de décider s'il convient ou non de les fournir.


Les notes doivent être aussi précises et complètes que possible. Il est difficile pour l’intervieweur de poser des questions, d’écouter ce qui se dit, de voir comment il se dit, d’envisager la question suivante et d’écrire des notes sur les réponses. Une solution serait de faire participer une deuxième personne à l’entretien afin de prendre des notes précises et complètes. Un preneur de notes présente l’avantage supplémentaire de fournir une deuxième oreille pour s’assurer que les interprétations de l’intervieweur sont exactes. L'inconvénient est qu'une deuxième personne peut changer la dynamique d'une conversation en augmentant le niveau d'intimidation de la personne interrogée.


Une alternative à la prise de notes serait d'enregistrer l'interview. La loi canadienne permet d'enregistrer une conversation à l'insu de la personne enregistrée tant que la personne enregistrée est présente en tout temps.


Bien que les notes ou enregistrements pris au cours d'une interview appartiennent à

l'intervieweur, ils sont découvrables et doivent donc être divulgués sur demande avant le procès. La crainte de devoir produire des notes devrait vous rendre prudent sur le contenu de vos notes. Cependant, ce n'est pas une excuse pour ne pas prendre de notes.


Les questions


La définition d'une interview est une conversation entre deux personnes ou plus au cours de laquelle l'intervieweur pose des questions pour obtenir des informations de la personne interrogée. Un entretien a également pour objectif de rassembler le plus d’informations possible et d’évaluer correctement la véracité des informations fournies.


Une interview réussie est une interview dans laquelle l'interviewé parle le plus souvent, peut-être à 85% ou plus. La quantité d'informations collectées dépendra de l'efficacité de l'intervieweur à poser des questions.


Les questions les plus efficaces commencent par qui, quoi, où, quand, pourquoi ou comment? Celles-ci sont appelées des questions ouvertes et génèrent généralement plus d'informations. Une question fermée appelle un "oui" ou un "non". Par exemple: "Savez-vous quelque chose à propos de...?" La personne interrogée peut simplement répondre "non".


Un type de question plus efficace est le type "Que savez-vous sur ...?" Voici quelques conseils pour poser des questions:


  • Les questions complexes qui contiennent trop de détails ou qui posent plusieurs questions doivent être évitées.


  • Faire écho aux commentaires de l'interviewé peut être utile. La mise en miroir impliquerait de répéter les derniers mots qui ont été prononcés.


  • Lorsqu'il est confronté à des problèmes techniques de comptabilité lors d'un entretien avec une personne sophistiquée, l'intervieweur doit tenter de limiter au maximum l'utilisation du jargon. Quand un certain jargon est requis, les termes doivent être définis pour éviter tout malentendu car les deux parties peuvent interpréter le jargon différemment.


  • N'interrompez pas une réponse.


  • Ne commencez pas une déclaration avec une attente négative telle que: "Je réalise que c'est stressant pour toi ..." ou " Je comprends que tu ne connais peut-être pas grand-chose à ce sujet ..." ou "Je sais que tu as peut-être oublié beaucoup depuis, mais ... "


  • Commencez par des phrases altruistes pour sécuriser la coopération, telles que "J'ai besoin d'aide ...", "Cela m'aiderait vraiment à revoir quelques points ..." ou"J'ai besoin de votre aide pour clarifier quelques points. ... " Le silence est un outil très puissant. Nous avons tendance à être mal à l'aise avec l'air mort et nous voulons le remplir. Cependant, il faut permettre à l’interviewé d’être celui qui remplit l’espace.


  • Une fois que la bonne question a été posée, l'intervieweur doit écouter et observer la réponse reçue.


Écouter ce que la personne dit


Lors d’un entretien, il est également nécessaire d’évaluer si les réponses fournies sont véridiques. L'écoute est un travail difficile. Il faut de la concentration; on doit non seulement écouter les mots prononcés et le choix des mots utilisés, mais également la manière dont ils sont dits. Un comptable enquêteur trouvera qu'écouter ce que la personne dit, et comment elle dit, peut-être utile pour évaluer l'honnêteté. Lorsqu’on essaie de collecter des informations, il faut tenir compte des points suivants:


  • L’intervieweur connaîtra la réponse à certaines questions. Ces questions doivent être posées de manière à faire croire à l’interviewé qu’on n'a pas la réponse afin de déterminer dans quelle mesure les réponses fournies sont véridiques.


  • Comment la personne répond-elle aux questions posées? Lorsque des émotions sont exprimées et que des détails sont fournis, l’histoire a plus de chances d’être vraie. Une personne qui ment fournira un minimum de détails afin de réduire le risque d'oubli d'un mensonge qu’elle a raconté.


  • L’humeur de la personne interrogée change-t-elle pendant les questions? Il est souvent possible d'identifier des niveaux de stress accrus associés à un inconfort à répondre à certaines questions lorsque la personne ment.


  • Les réponses sont-elles claires ou sont-elles trop complexes? Certains problèmes que le comptable enquêteur peut être amené à examiner peuvent être de nature technique complexe et difficile à comprendre, tels que les opérations sur produits dérivés. La personne interrogée explique-t-elle les problèmes de manière complète et claire ou tente-t-on de minimiser l'intervieweur en lui suggérant qu'il / elle ne pourrait pas comprendre des concepts aussi complexes? Quelqu'un qui n'a rien à cacher expliquera les choses pour que l'interviewer puisse comprendre.


  • Les questions complexes qui contiennent trop de détails ou qui posent plusieurs questions doivent être évitées. Il faut considérer l’utilisation de tactiques dilatoires utilisées par la personne interrogée, qui se manifestent par la rapidité de réponse aux questions posées. Une réponse véridique ne prend pas le temps de formuler. Un temps de réflexion excessif pour formuler des réponses peut être un signe que la personne interrogée cherche du temps pour formuler un mensonge. En outre, les demandes de clarification et de répétition de questions pourraient indiquer la nécessité de formuler un mensonge.


  • Considérez le choix de la langue utilisée. L'usage excessif de mots « tortillés » ou « twistés » peut être un signe que la personne interrogée n'est pas franche. Soyez conscient de mots et d'expressions tels que: …Au mieux de ma connaissance… Crois-moi ...ou …En vérité ...


Observer le language corporel


Beaucoup de choses ont été écrites sur le langage corporel en tant qu'outil pour déterminer si quelqu'un dit la vérité. La théorie derrière le langage corporel est qu'il est inconscient et donc plus révélateur.


Les mots peuvent envoyer un message mais le langage corporel peut en envoyer un autre. Il faut beaucoup d’habileté et d’expérience pour lire le langage corporel d’une personne avec précision, mais, au niveau le plus élémentaire, il est nécessaire d’observer les changements survenant dans le corps au fil de l’interrogatoire ou de l’entrevue. Il faut commencer par observer leur langage corporel lorsque des sujets non menaçants sont abordés, tels que leurs antécédents ou la description de leurs tâches, etc., et ce, au début de l’interrogatoire ou de l’entrevue, et lors de la phase de l'établissement de la relation. L’interviewer comparera alors ce langage corporel à celui manifesté lorsque des questions plus accusatrices sont posées.


Voici quelques exemples de langage corporel relier au mensonge à connaître:


  • Les bras ou les jambes croisés peuvent indiquer une gêne liée aux questions;


  • Les gens se touchent le visage, en particulier le nez, plus souvent quand ils mentent;


  • Incapacité à maintenir un contact visuel. Les gens ont tendance à détourner les yeux quand ils mentent ou ils peuvent jeter un coup d'œil sur l'intervieweur et rapidement détourner le regard;


  • La voix peut changer de ton quand les gens sont nerveux;


  • Le visage peut devenir rouge et la bouche devenir sèche;


  • La respiration devient plus rapide.


Bien qu'aucun de ces exemples ne prouve de manière concluante que quelqu'un ment, ces derniers peuvent nous indiquer l'état d'esprit dans laquelle la personne interrogée se trouve.

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